Les zabbâlîn, migrants pauvres venus de Haute-Egypte au Caire dans les années 1930, sont des chrétiens coptes qui collectent les ordures et les recyclent dans les quartiers où ils habitent dont le plus grand et le plus connu est Manshiyat Naser.
Contrairement aux récupérateurs marocains et turcs que nous connaissons bien, les zabbâlîn ne se contentent pas de collecter et trier les déchets avant de revendre ceux qui sont valorisables à des grossistes ou des entreprises spécialisées dans le recyclage : ils transforment eux-même certaines des matières récoltées comme, par exemple, le plastique.
En ce mois de février 2017, toujours avec ma complice BF, nous sommes retournés à Manshiyat voir quelques anciens amis récupérateurs qui nous ont mis en contact avec un de leurs collègues spécialisé dans l’aluminium qu’il recycle principalement à partir des canettes de boissons qui sont ramenés de toute la ville par les zabbâlîn.
Ces canettes sont d’abord triées puis stockées dans de grands sacs, parfois compressées en balles rectangulaires. Puis elles sont amenées par camion ou pick-up dans l’un des ateliers de recyclage d’aluminium qui sont tous situés au pied de la falaise du Mokattam qui limite le côté est du quartier de Manshiyat Naser. Arrivés dans cet atelier, nous avons été étonnés par la simplicité du système de fonte de l’aluminium : pas de four compliqué, juste un simple creuset en ciment réfractaire avec un système d’allumage alimenté en air par un ventilateur et dont le carburant est de l’huile de vidange…
Une fois le creuset mis en chaleur, les ouvriers vont le charger en canettes d’aluminium qui vont fondre et couler à l’intérieur de celui-ci (la température de fonte de l’alu est d’environ 650°). La chaleur est intense, l’odeur quasi indescriptible… Progressivement, tout ce qui n’est pas aluminium brule, puis ce dernier se liquéfie et coule au fond du creuset. C’est assez sommaire comme installation, mais il faut faire vite et sans protection
Une fois l’ensemble des canettes fondues, seul l’aluminium liquide reste dans le creuset. A l’aide d’une simple casserole à long manche, l’un des ouvriers prélève de l’aluminium pour remplir des moules en ciment réfractaire. Dès que l’aluminium se solidifie, un autre ouvrier démoule les lingots pour libérer le moule qui sera à nouveau rempli très rapidement.
Et voilà, buveurs de Stella, comment finissent vos canettes vides… A 1000 euros la tonne (2017), c’est un métier très rentable, du moins si l’on ne tient pas compte de la pollution et des conditions de travail indescriptibles par la photographie.
Un grand merci à M. B. de nous avoir ouvert les portes de son atelier et de nous avoir longuement expliqué son métier.